Anonyme
LA GUEUSAILLE
[Paris, Bibliothèque nationale de France, Rés. Vma ms 571, n° d.291]
Attribution
Cette chanson provençale, considérée comme « remarquable » et intitulée « La geusaille » par Brossard (Catalogue, p. 351-352), est anonyme (voir Dossier attributions).
Source
Anonyme, La Gueusaille, dans Recueil Deslauriers (n° d.291), partition, ms, 352 x 220 mm, f. 234v-235v, F‑Pn/ Rés Vma ms 571
(trois derniers systèmes du f.234v ; f. 235 en entier ; trois premiers systèmes du f. 235v)
le premier système de chaque feuillet a été rogné lors de la reliure ; la partie de haute-contre est donc lacunaire aux mes. 21-26 et 49-56 ; une proposition de reconstitution est proposée ici en tenant compte de l’emplacement du texte, visible, et de quelques signes qui restent apparents dans le bas de la portée
Datation – Provenance
Aucun élément factuel ne permet de dater cette chanson pour laquelle aucune autre concordance n’a été établie. Pour la provenance, la référence à l’Espitau pourrait renvoyer à la Charité de Marseille, bien que le dialecte employé ne soit pas précisément marseillais.
Effectifs – Disposition – Interprétation
ut2,ut3,ut4
Cette pièce, notée sans accompagnement, se chante à trois voix d’hommes : haute-contre, taille et basse. On pourra ajouter une basse continue en doublant la partie vocale la plus grave.
Notes sur le texte
Chanson provençale dont la narration est assurée par un groupe de trois misérables qui lui donnent son titre. Ces gueux sont d’abord montrés en train de claquer des dents et d’interpeller les passantes pour obtenir un peu de vin, puis dans la cour de l’hôpital en train de se chauffer en attendant le pichet de vin. Si les gueux apparaissent dans les littératures française et occitane du xviie siècle, le sujet est rare en chanson (voir le dossier de Jean-François Courouau).
Texte
La Gueusaille
Tres, tres, fen tous tres bouones (a) gens.
Lou frech nous (b) fa couta leis dens.
Fen senso (c) ferre de tachetos.
Auteis (d) fremos a leis brouquettes,
Cridan despuis (e) estou matin :
Vistes nous d’un gipon de vin.
Estranpalas davant un fuec,
A l’Espitau daquestou luec,
Si dindo, nen faren gougueto.
Aqui, coumandan a bagueto (f).
Tirotenla pensie,
Afflato ti pechie.
(a) source (toutes parties) : « boüones ».
(b) id. (t) : « nou ».
(c) id. (t) : « sesso ».
(d) id. (t) : « autey » ; (b) : « autei ».
(e) id. (plus loin) : « depui ».
(f) id. (t) : « bageto ».
Traduction
La Gueusaille
Gla-gla, nous faisons gla-gla, bonnes gens.
Le froid nous fait claquer des dents.
Sans fer, nous fabriquons de petits clous.
Belles dames, ici les broquettes,
Nous crions depuis ce matin :
« Habillez-nous d’un jupon de vin ».
Affalés devant un feu
À l’hôpital de cet endroit,
Si ça sonne, nous nous régalerons.
Ici, nous commandons à la baguette.
Va-t’en, chagrin,
Approche-toi, pichet.
(établissement du texte et traduction : Jean-François Courouau)